Les défis de l'accès aux ressources : terres, eau et financement


L’agriculture à Goma est confrontée à plusieurs obstacles structurels qui freinent la productivité des exploitations agricoles. L’un des principaux défis réside dans l’accès aux ressources essentielles telles que les terres cultivables, l’eau pour l’irrigation et les financements pour l’achat de matériel et d’intrants agricoles. Ces difficultés affectent directement la capacité des agriculteurs à améliorer leurs pratiques et à accroître leurs rendements. Dans ce focus, nous explorons ces défis majeurs et analysons les solutions potentielles pour les surmonter.


Accès à la terre : un conflit de propriété et de disponibilité

L’accès à la terre cultivable à Goma est l’un des plus grands défis pour les agriculteurs. En raison de la croissance démographique rapide, de l’urbanisation et des conflits fonciers, de nombreuses terres agricoles sont soit sous-exploitées, soit accaparées par des projets immobiliers. La question de la propriété foncière est complexe, avec des terres souvent revendiquées par plusieurs parties, y compris des personnes déplacées, des autorités locales et des entreprises.


L’inefficacité des politiques foncières, l’absence de cadastre fiable et les conflits liés aux frontières des propriétés agricoles rendent l'accès à la terre incertain. Pour de nombreux agriculteurs, cette incertitude freine l'investissement dans des pratiques agricoles durables, limitant leur capacité à moderniser leurs exploitations.


Témoignage de Jean-Marie Kambale, un agriculteur local :
"J’ai hérité de terres de mes parents, mais il y a toujours des problèmes de limites. Parfois, des voisins viennent revendiquer ma terre, et la situation devient difficile. Sans un titre de propriété clair, il est impossible d'obtenir un prêt pour investir dans de meilleures pratiques agricoles."


L'Eau : une ressource rare et précieuse

L’eau, essentielle à la production agricole, est une autre ressource cruciale dont l’accès reste problématique pour de nombreux agriculteurs à Goma. Bien que la ville soit située à proximité du lac Kivu, l'accès à l’eau pour l’irrigation est limité, surtout en période de sécheresse ou lorsque les infrastructures hydrauliques sont défectueuses.


De plus, les agriculteurs dépendent souvent des méthodes d’irrigation traditionnelles, peu efficaces, et ne disposent pas des technologies modernes qui pourraient optimiser l’utilisation de l’eau. L’irrigation goutte-à-goutte, par exemple, reste largement sous-utilisée en raison du coût élevé des équipements et de la méconnaissance des techniques modernes.


Témoignage de Félicité Niyonkuru, une agricultrice de la périphérie de Goma :
"Il y a des saisons où il ne pleut pas assez, et je dois compter sur l’eau des ruisseaux proches. Mais l’eau est souvent insuffisante pour irriguer toutes mes parcelles. Si j’avais accès à un système d’irrigation efficace, je pourrais augmenter ma production et réduire les risques liés à la météo."


Le Financement : un obstacle à l'investissement agricole

L’accès au financement reste un autre frein majeur pour les agriculteurs de Goma. Bien que l’agriculture soit un secteur clé de l’économie locale, les petits exploitants agricoles n’ont souvent pas accès aux crédits nécessaires pour acheter des semences de qualité, des engrais, ou des équipements modernes. Les banques et les institutions financières locales jugent souvent les agriculteurs comme des emprunteurs à haut risque en raison de l’incertitude liée à la production agricole, aux aléas climatiques et aux problèmes fonciers.


Les programmes de microcrédit existent, mais ils sont souvent insuffisants ou inaccessibles à de nombreux agriculteurs en raison de la complexité des démarches administratives et des taux d’intérêt élevés.


Témoignage de Jean-Baptiste Kakule, un jeune agriculteur :
"J’ai une petite exploitation de maïs, mais je ne peux pas me permettre d’acheter des semences de qualité ni d’investir dans des équipements modernes. Quand j’ai essayé d’obtenir un prêt, on m’a demandé des garanties que je n’ai pas. Cela rend les choses très difficiles."


Solutions potentielles : des approches collaboratives et innovantes

Pour surmonter ces défis, plusieurs solutions sont en cours d’étude et mises en œuvre par des acteurs locaux et internationaux.

  1. Réformes foncières : Il est essentiel de renforcer les mécanismes de gestion des terres agricoles, de promouvoir des titres fonciers clairs et d’améliorer le cadastre pour assurer une sécurité juridique aux exploitants. Certaines initiatives gouvernementales et non gouvernementales travaillent sur des solutions pour régulariser les titres fonciers, tout en encourageant la décentralisation des processus administratifs.

  2. Gestion de l’eau : Des solutions comme l’irrigation goutte-à-goutte ou la collecte des eaux de pluie, qui sont plus économes en ressources, commencent à se diffuser, mais elles nécessitent des investissements initiaux. Des programmes de formation et des subventions pour l’acquisition de systèmes d’irrigation pourraient aider à surmonter ce défi.

  3. Accès au financement : Pour améliorer l’accès au crédit, des institutions financières pourraient développer des produits financiers plus adaptés aux besoins des agriculteurs, comme des crédits à faible taux d’intérêt, ou des fonds d’investissement destinés à soutenir les projets agricoles locaux. Les partenariats public-privé pourraient également jouer un rôle clé en facilitant l’accès aux financements.

  4. Collectifs agricoles : La création de coopératives agricoles permettrait aux agriculteurs de bénéficier d’une plus grande puissance de négociation pour accéder aux ressources, aux technologies et aux financements. Ces structures pourraient également jouer un rôle important dans la gestion des terres et l’utilisation de l’eau de manière plus efficace.


Conclusion : une approche collaborative pour un avenir meilleur

Les défis d’accès aux ressources à Goma ne sont pas insurmontables. Grâce à des réformes adéquates, une meilleure gestion des ressources naturelles et des solutions de financement adaptées, l’agriculture de la région peut se moderniser et se renforcer. Une approche collaborative entre les autorités, les entreprises et les agriculteurs est nécessaire pour offrir des solutions pérennes et transformer l’agriculture à Goma en un secteur plus productif et résilient.