Les nouvelles technologies, levier de croissance pour l’économie locale ?


Par Patient NGANDU
Consultant en stratégie et développement local, Fondateur du Journal OWANDJI


À Goma, comme ailleurs en Afrique, la transformation numérique ne relève plus de la théorie ou du discours lointain : elle est déjà en marche. Dans les bureaux, les ateliers, les écoles, ou les rues commerçantes, les outils numériques commencent à structurer des pratiques, à dynamiser des initiatives, et à ouvrir des perspectives inédites pour l’économie locale. Mais cette dynamique soulève une question essentielle : les nouvelles technologies peuvent-elles devenir un véritable levier de croissance pour notre économie ?


Une économie locale en mutation numérique

Les entreprises locales, souvent confrontées à des défis structurels comme le manque de financement, la faible productivité ou l’accès limité aux marchés, trouvent dans les technologies des solutions pratiques pour améliorer leurs opérations.

  • Les logiciels de gestion (comptabilité, facturation, CRM) facilitent la formalisation des activités.
  • Les plateformes e-commerce offrent aux commerçants un accès à une clientèle au-delà des frontières de la ville.
  • Les services de paiement mobile réduisent les barrières liées à l’accès bancaire traditionnel.

Cette transition, bien que lente, représente une mutation stratégique : elle permet aux PME de gagner en visibilité, en efficacité et en compétitivité.


Une opportunité pour l’emploi et la formation

Le numérique n’est pas seulement un outil pour les entreprises : c’est aussi un secteur d’activité en soi, générateur d’emplois pour les jeunes. À Goma, de plus en plus de jeunes se forment au développement web, au graphisme, à la gestion de réseaux sociaux ou à la cybersécurité. Ces compétences, encore peu intégrées dans les programmes de formation classique, répondent pourtant à une demande réelle sur le marché.

Il est donc urgent d’adapter les systèmes de formation professionnelle et académique pour intégrer pleinement les compétences numériques dans les cursus, tout en favorisant les approches pratiques, les partenariats avec les entreprises locales, et l’apprentissage par projets.


Le rôle central de l’infrastructure numérique

Aussi prometteuse soit-elle, la digitalisation reste tributaire d’un prérequis majeur : l’infrastructure. Or, à Goma, plusieurs freins subsistent :

  • Un accès irrégulier à l’électricité, qui limite l’usage des outils numériques au quotidien.
  • Une couverture Internet encore coûteuse et instable, en particulier dans les quartiers périphériques.
  • L’absence de lieux publics équipés (hubs, centres de formation, bibliothèques numériques) pour soutenir l’apprentissage et l’innovation.

Il est donc indispensable d’investir, à l’échelle publique et privée, dans l’accessibilité technologique : énergie fiable, Internet abordable, équipement adapté.


Vers un écosystème numérique local et inclusif

Le numérique ne transformera pas Goma par magie. Il doit s’inscrire dans une vision cohérente du développement local. Cela suppose :

  • Des politiques locales volontaristes, qui soutiennent l’innovation, l’entrepreneuriat numérique et la formation.
  • Des partenariats solides entre acteurs publics, entreprises, universités, ONG et bailleurs.
  • Une culture de la collaboration et du partage des savoirs, pour éviter la concentration des opportunités et favoriser une digitalisation inclusive.

Conclusion : Le numérique comme accélérateur, pas une solution miracle

Les technologies, à elles seules, ne résoudront pas tous les défis structurels de notre économie. Mais bien intégrées, elles peuvent en accélérer la transformation, en rendant les entreprises plus résilientes, les jeunes plus qualifiés, et la ville plus connectée au monde.

La question n’est donc plus de savoir si le numérique est un levier de croissance, mais plutôt comment en faire un levier accessible, équitable et durable pour tous à Goma.