Parler d’entrepreneuriat en République démocratique du Congo, c’est souvent évoquer la résilience, la patience et la débrouillardise. Pourtant, pour beaucoup de chefs d’entreprise, la ligne est fine entre persévérance et découragement. Créer des emplois, soutenir l’économie locale, investir dans la production : tout cela est porté par une volonté sincère. Mais la réalité quotidienne étouffe cette ambition.
Le poids des tracasseries administratives
Au-delà des impôts officiels, légitimes dans tout État organisé, les entrepreneurs congolais subissent une multitude de services publics qui, chacun à son tour, réclame sa part. De la fiscalité parallèle aux redevances obscures, on ne sait plus si tout converge réellement dans les caisses de l’État ou si cela alimente simplement une chaîne d’abus.
Le cas du ministère de PTNTIC, qui exige même des redevances pour l’usage de caméras de surveillance, illustre l’absurdité de la situation. Jusqu’aux églises qui devraient payer pour sécuriser leurs fidèles ! Trop, c’est trop.
Une production asphyxiée par l’énergie
À ces tracasseries s’ajoute la question cruciale de l’électricité. Comment un boulanger peut-il produire du pain sans courant ? Comment une entreprise peut-elle planifier sa production avec seulement 15 jours de service sur 30, malgré les factures de la Snel ?
Le recours au groupe électrogène, censé être une solution, se transforme en gouffre : 50 % des bénéfices s’évaporent dans le carburant. C’est une équation intenable pour toute entreprise qui veut rester compétitive.
Le risque du découragement
Face à ces réalités, beaucoup d’entrepreneurs envisagent de tout fermer. Ce n’est pas par manque de courage, mais parce qu’ils se heurtent à un environnement qui pénalise ceux qui veulent créer de la valeur et des emplois. Un pays qui décourage ses créateurs de richesses, c’est un pays qui hypothèque son avenir.
Quelle solution ?
La première urgence est la rationalisation des services publics : un guichet unique clair, des taxes centralisées et une traçabilité des fonds. Ensuite, une réforme énergétique sérieuse, capable de garantir un accès stable à l’électricité, au moins pour les secteurs stratégiques comme l’agroalimentaire. Enfin, une protection effective des entrepreneurs contre les abus des agents publics.
La question demeure : est-ce que nos autorités réfléchissent à ces réalités ou sont-elles enfermées dans une logique de court terme ?
En conclusion, entreprendre en RDC est devenu un acte de bravoure. Mais la bravoure seule ne peut pas bâtir une économie solide. Si les autorités veulent réellement soutenir la création d’emplois et l’essor des PME, elles doivent écouter les cris d’alerte des entrepreneurs, alléger le fardeau administratif, et offrir un cadre digne pour produire. Car un pays qui maltraite ses entrepreneurs est un pays qui scie la branche sur laquelle repose son développement.