Kinshasa, la marche forcée des oubliés du transport
Kinshasa, ce jeudi. J’ai marché de Mandela à l’UPC. Non pas par choix sportif, mais par nécessité. Pas de transport. Comme tant d’autres Kinois, j’ai expérimenté ce que signifie l’abandon silencieux d’une capitale à la merci de ses propres contradictions.
Une capitale à genoux devant la mobilité
Kinshasa, mégalopole de plus de 15 millions d’habitants, fonctionne au rythme de ses taxis-bus, de ses motos et de ses tricycles. Mais depuis des semaines, la pénurie de moyens de transport, aggravée par la flambée du prix du carburant et la vétusté du parc automobile, paralyse la ville. Les Kinois marchent. Des kilomètres entiers, sous un soleil accablant ou dans la poussière, pour aller travailler, étudier, chercher de quoi survivre.
Le prix social de la marche forcée
Cette crise du transport n’est pas qu’un problème de logistique. C’est une crise sociale. Les retards se multiplient, les journées de travail se raccourcissent, les revenus s’effritent. Des étudiants ratent leurs cours. Des malades peinent à rejoindre un hôpital. Le quotidien du Kinois devient une lutte contre l’épuisement.
Les promesses oubliées
Pourtant, les promesses politiques n’ont pas manqué. Les projets de modernisation du transport urbain – bus Transco, relance du chemin de fer urbain, partenariat public-privé – sont restés au stade d’annonces. Résultat : une capitale africaine du XXIe siècle continue de dépendre de solutions artisanales et aléatoires.
Quand l’État se tait, la débrouille règne
Faute d’un plan clair, les Kinois inventent leurs propres solutions : covoiturage improvisé, taxis clandestins, motos surexploitées. Mais cette débrouillardise a ses limites. Elle se paie en insécurité routière, en inflation des tarifs et en épuisement physique.
Un droit fondamental négligé
Le transport n’est pas un luxe. C’est un droit fondamental à la mobilité, condition sine qua non de la dignité et de la productivité d’une population. Une ville sans transport efficace est une ville asphyxiée. Kinshasa étouffe.
Conclusion : marcher n’est pas une politique
Tant que l’État ne placera pas la question du transport urbain au cœur de sa politique publique, la capitale continuera d’imposer à ses habitants la marche forcée. Et chaque pas que fait le Kinois sur ses longues distances quotidiennes devient une métaphore douloureuse : celle d’un peuple qui avance malgré tout, mais sans direction claire, faute de leadership visionnaire.
Kinshasa mérite mieux qu’une ville où marcher devient la seule option.