Goma : quand le taux de change devient une affaire de justice
Ce lundi, au marché de Birere, la confusion a éclaté suite à l’arrestation de quatre cambistes accusés d’appliquer le taux de change de Kinshasa plutôt que celui en vigueur localement. Un fait inédit, qui soulève des questions de fond sur la régulation monétaire, la justice économique et le rôle de l’État dans un marché aussi sensible que celui du change.
Le franc congolais traverse des turbulences. Les taux fluctuent d’une ville à l’autre, créant un fossé entre la capitale et les provinces. Les cambistes, acteurs essentiels du quotidien économique, se retrouvent souvent au carrefour de ces contradictions : d’un côté, la pression des réalités économiques et des taux qui circulent à travers le pays ; de l’autre, l’exigence des autorités locales qui veulent maintenir une certaine stabilité et éviter une spirale inflationniste incontrôlable.
Mais la question demeure : peut-on criminaliser une pratique née d’une réalité économique ? Les cambistes de Goma ne sont pas des spéculateurs déconnectés, ils sont les miroirs d’un marché où l’offre et la demande dictent leur loi. Leur arrêter revient à sanctionner le thermomètre plutôt que de soigner la fièvre.
L’État doit certes protéger la population des abus et des manipulations, mais il doit surtout travailler à harmoniser et stabiliser le taux de change sur l’ensemble du territoire. Car un pays où chaque ville affiche son propre dollar est un pays exposé à l’anarchie monétaire.
Cette affaire rappelle une vérité essentielle : l’économie ne se gouverne pas par la répression mais par la régulation, la transparence et la confiance. Au lieu de semer la peur chez les cambistes, les autorités gagneraient à instaurer un mécanisme clair, crédible et équitable pour encadrer le marché de change.
À Goma comme ailleurs, la stabilité monétaire n’est pas une affaire de coups de force, mais de politique économique cohérente. C’est à ce prix seulement que le franc congolais pourra regagner la confiance des citoyens.