Les investisseurs à Goma : histoires de succès et défis à surmonter
1. Claire Kasinge : l’agro-industrie au service du développement rural
Née à Goma, Claire Kasinge est revenue s’installer dans sa ville natale après des études en agroéconomie à Nairobi. En 2021, elle fonde AgriKivu, une entreprise spécialisée dans la transformation de produits agricoles locaux (manioc, maïs, haricots) en produits emballés, prêts à consommer.
"Je voulais montrer qu’on pouvait faire de l’agro-industrie à Goma, pas seulement cultiver mais aussi transformer et valoriser."
Grâce à un financement de la BAD et au soutien de l’incubateur local KivuHub, AgriKivu a mis en place une mini-usine à Munigi, employant 22 personnes, dont la majorité sont des femmes rurales.
Succès :
- Produits distribués dans les supermarchés de Goma et Bukavu
- Exportation test vers Kigali et Kampala
- Réduction des pertes post-récolte pour 300 producteurs partenaires
Défis :
- Accès irrégulier à l’électricité
- Transport coûteux depuis les zones rurales
- Complexité des procédures douanières
"Il faut de la patience, de la formation continue et une bonne compréhension du marché. Mais surtout, croire en la valeur de ce que l’on produit ici."
2. Jean-Paul Bashige : miser sur le tourisme durable
Avec son agence "Volcan Trails", lancée en 2022, Jean-Paul Bashige, ancien guide du Parc des Virunga, mise sur un tourisme écologique de niche. Il propose des circuits combinant randonnées autour du lac Kivu, ascension du Nyiragongo (quand les conditions le permettent), et immersion dans les villages artisanaux.
"Le tourisme peut être une source de paix et de prospérité si on le développe intelligemment."
Jean-Paul a su attirer une clientèle étrangère via des plateformes comme Viator et AirBnB Experiences, tout en collaborant avec les structures locales pour former des guides et offrir des hébergements chez l’habitant.
Succès :
- Plus de 800 touristes accueillis en deux ans
- Création de 17 emplois directs
- Contribution à la notoriété de Goma comme destination écologique
Défis :
- Perception sécuritaire encore négative à l’international
- Faible appui institutionnel au secteur touristique
- Difficulté à obtenir des visas pour certains clients
"L’État doit prendre au sérieux le potentiel du tourisme ici. Il faut une vraie politique de valorisation de notre patrimoine."
3. Gisèle Kambale : une pionnière de la tech féminine à Goma
Diplômée en informatique de l’Université de Goma, Gisèle Kambale a fondé en 2020 "MamaTech", une start-up qui développe des applications pour les PME locales et propose des formations en numérique aux femmes entrepreneures.
"Je voulais créer une entreprise utile et inspirante. Trop de femmes pensent que la tech est un domaine fermé. Moi je veux prouver le contraire."
MamaTech collabore avec des incubateurs et des ONG pour former chaque année plus de 150 femmes aux outils numériques : facturation mobile, réseaux sociaux, e-commerce.
Succès :
- Lancement d’une plateforme de gestion simplifiée pour salons de coiffure et ateliers de couture
- Obtention d’un mini-financement de l’ambassade de France
- Partenariats avec 3 écoles pour l’initiation au code
Défis :
- Coût élevé de la connectivité
- Stéréotypes de genre dans le secteur numérique
- Difficulté à fidéliser les développeurs qualifiés
"Investir à Goma, c’est aussi investir dans les talents humains. Je crois beaucoup dans l’éducation et l’innovation locale."
4. Alain Rukundo : la logistique comme levier de croissance
Originaire de Bukavu, mais installé à Goma depuis 2018, Alain Rukundo a lancé "TransKivu", une société de logistique et de transport spécialisée dans le fret transfrontalier entre la RDC, le Rwanda et l’Ouganda.
"J’ai vu qu’il y avait une vraie opportunité dans l’amélioration de la chaîne logistique, surtout pour les PME locales qui importent et exportent."
TransKivu propose un service de gestion complète : stockage, dédouanement, livraison. Elle s’appuie sur des solutions numériques pour le suivi en temps réel.
Succès :
- Flotte de 9 camions opérationnels
- Partenariats avec 50 entreprises régionales
- Réduction du temps de transit Goma-Rubavu de 48h à 12h
Défis :
- Corruption et lenteurs à certains postes de douane
- Variabilité des règles transfrontalières
- Insécurité sur certains axes logistiques
"Il faut de la rigueur, de la diplomatie et de la technologie. Et un bon réseau de partenaires de confiance."
Conclusion : des parcours inspirants, une vision partagée
Chacun de ces investisseurs, dans des secteurs aussi variés que l’agriculture, le tourisme, la technologie ou la logistique, témoigne d’un engagement profond pour le développement de Goma. Si les défis restent nombreux instabilité réglementaire, difficultés d’accès aux infrastructures, besoin de main-d’œuvre qualifiée, les opportunités sont bien réelles pour ceux qui innovent, s’adaptent et persévèrent.
Leur message aux futurs investisseurs est clair :
- "S'informer avant d'agir."
- "Construire un réseau local solide."
- "Avoir une vision à long terme."
Ces histoires individuelles contribuent à écrire une nouvelle narration économique pour Goma celle d’une ville qui attire, qui crée, et qui croit.