L’ONEM muscle sa collecte, les entreprises sous pression

La publication, le 20 août 2025, de l’arrêté ministériel portant extension de la contribution patronale due à l’Office National de l’Emploi (ONEM) de 0,2 % à 0,5 % marque un tournant important dans la relation entre l’État congolais, ses employeurs et le marché du travail.

Derrière ce qui peut sembler être un simple ajustement technique se cache en réalité un triple enjeu : financier, social et économique.

1. Un levier budgétaire pour l’ONEM

L’augmentation du taux de cotisation vise à renforcer les ressources de l’ONEM, censées financer les politiques actives de l’emploi : accompagnement des chômeurs, formation continue, insertion professionnelle. Dans un pays où le chômage urbain frôle les 47 % chez les jeunes selon les dernières estimations, l’argument paraît recevable. Mais la vraie question demeure : ces fonds supplémentaires seront-ils effectivement utilisés pour créer de l’emploi ou se perdront-ils dans les méandres de la gestion publique ?

2. Une charge supplémentaire pour les entreprises

Pour les employeurs qu’ils soient publics, privés ou humanitaires, cette hausse représente un prélèvement automatique sur la masse salariale. Concrètement, une entreprise qui versait 200.000 FC de cotisations à l’ONEM par mois en paiera désormais 500.000 FC. Dans un contexte de fragilité des PME locales et de pression fiscale déjà élevée, la mesure pourrait accentuer le sentiment d’asphyxie. Certaines entreprises pourraient même être tentées de réduire leurs effectifs pour absorber cette charge supplémentaire.

3. Discipline et sanctions renforcées

Le dispositif s’accompagne d’un arsenal répressif :

  • Déclaration mensuelle obligatoire avant le 10ᵉ jour,

  • Paiement au plus tard 15 jours après,

  • Pénalité de 50 % en cas de déclaration inexacte,

  • Majoration de 0,5 % par jour de retard.

À ce rythme, une entreprise en défaut pourrait voir sa dette doubler en quelques mois. L’État cherche donc à imposer une discipline stricte, mais au risque de fragiliser encore davantage le tissu entrepreneurial déjà vulnérable.

4. Une flexibilité sous conditions

Le texte laisse toutefois une porte ouverte : le taux de 0,5 % pourra être revu en fonction de la conjoncture économique. Une clause qui, si elle est appliquée avec discernement, permettrait d’alléger la pression en cas de crise.


Un équilibre à trouver

Cette réforme, dans son principe, est défendable : financer l’emploi par une contribution solidaire des employeurs. Mais dans la pratique congolaise, elle risque de se heurter à deux écueils :

  • La défiance des entreprises qui craignent un impôt de plus sans retour concret.

  • Le manque de transparence de l’ONEM dans la gestion des fonds collectés.

Le succès de cette réforme dépendra donc de la capacité du gouvernement à rendre visible l’impact de ces contributions : insertion des jeunes, accompagnement des travailleurs licenciés, programmes de reconversion… Sans résultats tangibles, la mesure sera perçue comme une taxe de plus, et non comme un investissement pour l’avenir.