Quand Ebola refait surface, le Kasaï tremble

Le 4 septembre dernier, le couperet est tombé : la République Démocratique du Congo a officiellement déclaré une nouvelle flambée d’Ebola dans les localités de Bulape et Mweka, au cœur de la province du Kasaï. Vingt-huit cas suspects, seize décès, dont quatre agents de santé. Ce bilan, à peine annoncé, illustre déjà la brutalité silencieuse de ce virus qui, depuis des décennies, ressurgit comme une ombre persistante sur le destin congolais.

Face à ce nouveau front épidémique, une question nous hante : avons-nous vraiment tiré les leçons des précédentes crises ? Car Ebola, ce n’est pas seulement une tragédie médicale ; c’est un révélateur. Révélateur des fragilités de notre système de santé, du manque chronique d’infrastructures, mais aussi du courage admirable de nos soignants qui, souvent sans protection suffisante, se sacrifient en première ligne.

Il faut saluer la réaction rapide des partenaires internationaux, à commencer par le Programme Alimentaire Mondial qui, par le biais de son service aérien humanitaire, a acheminé près d’une tonne d’équipements médicaux et mobilisé dix experts du ministère de la Santé dans les zones touchées. Ce soutien est vital. Mais il ne doit pas nous détourner d’une évidence : la responsabilité première de protéger les Congolais revient à l’État congolais, qui doit investir davantage dans la résilience sanitaire et l’anticipation des crises.

Bulape n’est pas seulement une localité du Kasaï aujourd’hui endeuillée ; elle est le miroir d’un pays où chaque flambée d’épidémie rappelle cruellement que la santé reste un luxe pour trop de familles. La 16ᵉ flambée d’Ebola doit donc être l’occasion d’un sursaut collectif. Il est temps de transformer les promesses en actes concrets : renforcer les laboratoires régionaux, assurer la formation et la protection du personnel médical, et surtout rétablir la confiance avec des populations souvent méfiantes, voire désabusées.

Ebola tue, Ebola traumatise. Mais Ebola, paradoxalement, nous oblige à regarder en face nos vulnérabilités pour mieux les combattre. Le Kasaï, aujourd’hui frappé, ne doit pas être abandonné à son sort. Car sauver Bulape, c’est sauver l’honneur de tout un pays.